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Francis Traunig



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Septembre 2012

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30.09.2012 - Budapest - 20 heures 22

Cynthia, 22 ans, est New Yorkaise, voyage en Europe durant six semaines. A débarqué à Londres, vu Amsterdam et la voilà à Budapest pour 5 jours avant de prendre l'avion pour Venise et de là, se laisser porter par ses envies.

-La chose qui me faisait le plus peur c'était de ne pas rencontrer de gens et de rester seule...

Avec candeur, elle se pose des questions, égrène ses désirs, s'interroge.

-Et dans le Danube, il y a des crocodiles ?

La serveuse amène des bouteilles d'eau, Cynthia est médusée :

-Elle est magnifique cette bouteille, c'est la première fois de ma vie que je vois de l'eau minérale dans une bouteille en verre.

Rien de plus beau que l'émerveillement ! (Et rien de plus important que de le préserver.)

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29.09.2012 - Budapest - 10 heure 27

La saveur d'une ville, d'un lieu dépend toujours un peu de ce qui précède sa découverte. Des attentes qu'on peut avoir.

Mais moins on en a plus on reçoit... C'est sûr !

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28.09.2012 - Entre Bratislava et Budapest - 10 heures 43

Steeve pose une question et s'empare de la réponse pour, par rebond, placer une anecdote qui va lui permettre d'enchaîner sur un souvenir qu'il a vécu en 1986 à Shanghai. De Shanghai on va en Norvège, via le Portugal où, prévient-il, soudain grave, les femmes peuvent être violentes, même si elles sont très belles. Oui, je garde un souvenir mitigé de ce pays. Une femme m'a frappé. Sur la tête. Avec son poing. Mais pourquoi donc ? était-ce justifié ? demande très pertinemment Matt. Je ne me souviens plus. Je ne sais plus pourquoi elle m'a frappé. C'était pas sexuel, non, mais je me souviens juste du coup puissant que m'a donné cette magnifique portugaise.

Buvons ! Et il sort de son sac un alcool slovaque (goulot que je décline puisque non initié à ce genre de bonheur) qui arrache à mes deux compagnons un Ouaahh ! viril et grimaçant.

Je suis prof, oui, à la retraite, - tu nous parleras un peu de toi après, hein Francis ? et organise en même temps des excursions pour les écoles en Angleterre. Je fais aussi du Charity-business. J'ai levé des centaines de Livres pour la fondation Diana. Je l'adorais, et ai entrepris une marche du nord au sud de l'Angleterre : 1717 kilomètres en 31 jours. Je faisais en moyenne 57 kilomètres par jour, oui, je sais, c'est beaucoup. Reebook m'a sponsorisé, et j'ai usé trois paires de chaussures. Fantastiques chaussures, les Reebook... Splendide expérience... Oui... la Suisse, je connais bien, une amie m'a d'ailleurs dit qu'il y avait une très forte immigration aborigène en Suisse, c'est curieux, isnt'it ?

Je profite d'une hésitation de Steeve au sujet d'une de ses nombreuses aventures et demande à Matt qu'il nous parle un peu de son voyage. Matt a 27 ans, Néo-Zélandais, il est loin de chez lui pour deux ans. Il veut travailler une année à Londres avant de reprendre la route. Il sort d'un sac marin jaune imperméable un cahier dans lequel il a googlisé (ses termes) toutes ses envies de voyages :

Une course de formule 1, une randonnée en haute montagne, une île grecque, une corrida en Espagne, l'aurore boréale dans le grand nord, un concert de musique à Wien, la fête de la bière à Munich, Florence pour la culture, une duty free party sur un bateau en Scandinavie, Nyc pour un week-end, et...

-Oh regarde le château ! coupe Steeve

...et je veux aller à la Mecque, oui, la Mecque.

-Ça, c'est dangereux, reprend Steeve, le Liban, oui, quand j'ai été au Liban...

Ce coup-là c'est moi qui coupe :

-Mais tu connais la planète entière ?

-Oui j'ai visité 44 pays en trois ans...

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27.09.2012 - Bratislava - 09 heures 53

Il s'est pris un coup de couteau dans la figure, c'est tout ce que je sais de lui, nous ne nous comprenons pas autrement que par gestes maladroits. Et sur la revue qu'il me tend, sourit le Dalaï Lama, prince de la non-violence et des opprimés. Thank you ! Yes ! Et c'est avec les mêmes gestes maladroits que chacun retourne à son destin, avec un dernier thank you...

Bratislava, quelle belle allure joyeuse hier soir ! Un vent chaud remuait les arbres où sur des mètres de câbles tendus se balançait indolente une expo photo. Les jeunes filles étaient en promenade, généralement par deux, s'accrochant l'une à l'autre pour éviter de se casser la figure du haut de leurs hauts talons - et glougloutent de rire quand l'une se tort un pied avec des allures de jeune pouliche qui vient de naître. Les garçons, eux, baguenaudent en bande et jettent parfois des regards obliquent aux filles, en tirant sur leur clopes et en s'accrochant à leur bière.

On m'accoste deux fois pour me demander le chemin, en slovaque, une fois en allemand. Nein, ja, yes. Ne pas savoir parler n'empêche pas de communiquer. Yes, I learn french, me dit un jeune homme. Comment t'appelles-tu ? Merci beaucoup me répond-t-il, et mon rire le fait rire aussi. Il me demande ensuite si je suis anglais.

La très belle ville historique est prise d'assaut par des groupes de touristes qui débarquent d'immenses bateaux, des hôtels flottants de plus de 100 mètres de long, qui remontent ou descendent le Danube et font escale ça et là au gré du programme proposé. Puis disparaissent aussi vite qu'ils sont venus.

Accueil chaleureux au Musée de la Ville que je suis le seul à visiter. Un surveillant me précède, allume les salles, les éteint quand j'en sors, me guide et me couvre d'explications sur cette région vinicole réputée depuis le Moyen-Age. Au premier, les dames sont surprises de voir arriver quelqu'un, vite cherchent à allumer les lumières, mais il n'y a pas de courant électrique. Elles sont confuses mais la pénombre ajoute un sentiment d'intimité plaisant.

Sorry ! Sorry !

Je sors ravi.

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26.09.2012 - Vienne -12 heures 01

Sublime expo Klimt au Château du Belvedere de Vienne.

Beaucoup d'agitation, de débats, de discussions, d'appropriation de son travail par:

- 1 l'office du tourisme pour booster VIenne

- 2 les milieux féministes pour s'outrer de la sacralisation d'un érotomane talentueux

- 3 les hagiographes de Klimt qui veulent le placer à la source de l'Art Moderne

- 4 le commerce et les magasins de musées qui vendent des crayons Klimt, des aimants à frigo, des tasses, des foulards, des blocs-note, des calendriers, etc..


Chacun y allant de son petit refrain.


1ère supputation : Les pinceaux de Klimt sont en poils pubiens de jeunes vierges qu'il aurait arraché avec les dents.

2ème supputation : Les femmes que peint Klimt sont bien vivantes, bien en chair puisqu'il peint d'après photographies. Il les aurait dénudées, en aurait abusé sexuellement, profitant de leur ignorance.

3ème supputation : Venant de milieux défavorisés le plus souvent, elles ne pouvaient se défendre.

4ème supputation : Sa peinture est « Le laboratoire de l'Apocalypse » et annonce le déchirement entre tradition et modernité, déchirement qui dépeint l'indolente décadence de l'Empire que va enterrer Sarajevo.

5ème supputation : Il peignait ses modèles nus avant de les recouvrir d'or, de fleurs stylisées et d'étoffes richement décorées pour préserver le secret qui le liait au modèle.

Et c'est ainsi, qu'en tricotant les supputations avec les faits qu'on produit du mythe, le principal intéressé n'étant plus là pour confirmer ou infirmer.

A chacun donc son Klimt et a chacun son Histoire...

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25.09.2012 - Vienne - 19 heures 31

Vu un japonais figé devant l'Atelier du Peintre de Vermeer.
Vu un moine et un mendiant, face à face à l'entrée de la cathédrale, faire la manche.
Vu des bulles de savons s'éclater contre une femme nue, en marbre.
Vu un africain, dans le métro, faire semblant de téléphoner - peut-être pour se donner un peu de contenance.
Vu d'autres pareils, dégainer, regarder l'écran, rengainer et refaire la même chose, trente secondes après, comme s'ils avaient oublié qu'ils venaient de le faire trente secondes avant.
Vu un homme allongé sur les pavés photographier sa compagne.
Vu un visage d'homme qui aurait pu être peint par Dürer.
Vu une femme rire de me voir me battre avec mon plan de la ville.
Vu d'autres regarder comme moi les explications savantes au bas des tableaux.
Vu un nuage coincé entre deux immeubles au-dessus du Café Central.
Vu vibrer un arrosoir dans la lumière d'automne.

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24.09.2012 - Vienne - 16 heures 40

« VIENNE ! C'est maintenant où jamais. » m'annonce un dépliant.

-C'est maintenant parce qu'il faut vous décider rapidement, il n'y a bientôt plus une chambre de libre dans Vienne.

L'appliqué préposé de la Touristen Information n'a pas rajouté : "Mon pauvre Monsieur..." mais j'ai vu qu'il le pensait. Son polo couleur lavande était plein de taches de gras. Je suis pas très regardant mais impossible de ne pas s'imaginer le type arrondir ses fins de mois dans les cuisines d'un chinois - devant un wok.

-Et puisque nous y sommes, les bateaux pour Bratislava ?

-Complet jusqu'en décembre. Peut-être que ma collègue, à gauche en sortant, peut encore vous trouver une place dans les semaines qui viennent.

-Danke schön.

"Femme, alcool et bonne chère, Gustave Klimt était un authentique bon vivant... "

Oui les femmes. Partout. A poil sur les fontaines, en cariatides soutenant des balcons... il y a plus de femmes nues que de paysages dans les musées. Une véritable obsession (viennoise?).

"Peut-être que vous n'êtes pas à tu et à toi avec cet univers et que vous n'avez jamais osé aller à un concert - la peur de ne pas savoir quoi mettre, comment se comporter ni même à quel moment applaudir."

Ça commence aux alentours de dix sept heures : des hommes et des femmes en costumes d'époque, coiffés de perruques, vous draguent pour vous inviter à assister AU concert de la semaine (qui a lieu tous les jours). C'est charmant et on se photographie parmi.

"Au-delà des marques internationales très tendance, Vienne, ce creuset des métiers d'artisans, permet aussi de vivre une expérience shopping d'un autre genre."

C'est vrai. Et c'est une troublante sensation de marcher dans la Vienne commerçante où toutes les grandes marques se bousculent dans des arcades somptueuses et d'entendre battre les cloches le rappel des heures.

Vienne est un peu comme un gâteau au chocolat de chez Sacher : riche, onctueux, bourratif...

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23.09.2012 - Vienne - 17 heures 26

Après avoir repoussé l'armée de Soliman le magnifique un peu par miracle, avec l'aide de Dieu, bien sûr, mais aussi surtout grâce à un esprit combatif inoxydable, voilà Vienne évangélisée (500 ans plus tard) par un homme seul, un américain, qui ne parle pas l'allemand. Alors il peint sa foi, lui donne de la couleur avec une simplicité, un dépouillement qui est largement aux antipodes du style Rococo triomphant de la ville qu'il veut convertir.

Pisse-t-il dans un violon ? Le christ, sa mère, particulièrement, sont célébrés à tous les coins de rues. Partout la grandeur de l'église et du pouvoir se donnent la main dans le marbre.

Que cache cette passion de la peinture ?

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22.09.2012 - Maribor - 12 heures 06

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21.09.2012 - Maribor - 20 heures 44

Tombouctou, Zanzibar et Maribor m'ont toujours fait rêver. Sur une carte ou sur un menu c'est la musique des mots qui me fait saliver.

Alors je prends la route pour Maribor qui serpente, indolente, dans le paysage slovène. Ce soir, me prévient-on, ne pas manquer un spectacle de cirque en plein air. La fraîcheur du soir pousse les gens vers les intérieurs, mais près de la place où va se tenir le spectacle, il y a un groupe d'une trentaine de personnes qui trépigne bruyamment. Je me rapproche. Ce sont des autrichiens. Les hommes portent des chapeaux de feutre, pareils à ceux, me semble-t-il, des soldats italiens de la fanfare militaire qui claironnaient à Trieste, la JULIA... mais c'est un bus qui vient recueillir le groupe, ils n'iront pas au cirque, mais le font. Certains ont la chope à la main et chantent, un autre aide avec galanterie les femmes à monter dans l'autocar, et dès qu'elles se courbent sur la première marche, le goujat, gras comme un chapon, leur file une tape sur les fesses en riant fort. Un autre s'appuie sur le nez du bus et semble lui parler. Des poches de son pantalon dépassent une bouteille de rouge et un petit fouet de cuir tressé. Maribor n'est pas seulement EUROPEAN CAPITAL OF CULTURE 2012 mais aussi une région viticole renommée. Et abordable (au propre et au figuré) pour les voisins autrichiens.

Vingt heure. Le spectacle commence. Les artistes arrivent sur une petite scène posée à côté d'un splendide monument rococo, au sommet duquel trône la vierge avec son beau visage, paratonnerre des douleurs du monde.

Les artistes se mettent à nettoyer la scène, rangent, nous jouent l'ennui, la maladresse. Un zigue torse-nu, en patin à roulettes, se casse la gueule, mais pour de vrai, en manipulant un diabolo qui fout le camp dans le public et se partage en deux. Il faut improviser et ils improvisent. Arrive un couple, vêtu de noir qui transporte des pastèques, les tranche et cherche à les partager avec le groupe des maladroits... On va probablement vers une rédemption des maladroits lorsqu'ils auront goûté au fruit, un happy-end qui me fait bailler. Je vais au bord du fleuve.

Une déclaration sur l'Art, collée contre un bâtiment moderne se reflète dans l'eau qui tremblote...

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20.09.2012 - Ljubljana - 20 septembre 2012

Il débarque sans gêne, s'accoude contre le guichet, et se colle à un monsieur en conversation avec une préposée aux renseignements. Le monsieur fait pfittt, accompagné d'un geste de la main, et le malotru s'intercale entre lui et moi.

-I was here before you ! Please.

D'un air mauvais, il me balance une salve de grommellements dont le sens m'échappe, mais pas le ton.

-Please !

Il s'avance vers moi, menaçant. S'il avait été en bagnole et moi une biche (je dis biche parce qu'une biche c'est innocent) il m'aurait écrasé.

-Fuck english, I am Balkan ! I am Balkan !

Et me fait un bras d'honneur en bombant le torse.

Mais je ne cède pas et trouve Ljubljana toujours aussi belle et accueillante.

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19.09.2012 - Trieste - 13 heures 04

...buongiorno dove ce il mercato ? Le supermarché ? Vous cherchez un supermarché ? Non. Je cherche le marché aux poissons, aux légumes. Finito, schluss, fertig ! La halle, derrière vous, c'était ça le marché, ça a été transformé en salle d'exposition. On voit des photographies sur la misère des femmes et des enfants en Afghanistan... Arrivederci !

Un peu plus loin, un homme en slip, pousse triomphant un caddy chargé de bric à brac et fait rire deux vendeurs de colifichets africains. Un couple posé passe, comme si l'homme en slip était transparent. Je m'approche de lui et lance : La vita è bella! Son visage jovial passe au blême instantanément, et il pousse un rugissement féroce. Je me rends compte avoir dit une connerie, m'excuse et m'en vais.

A la gare routière, entre le va-et-vient des bus ronronnants, c'est un bal de sacs à dos et de valises à roulettes. Pina Bausch en aurait fait une pièce. Un petit frisé porte un sac plus gros que lui, sa copine, trois. Des espagnoles sont couchées sur les leurs comme sur des matelas pneumatiques. Des missionnaires américaines partagent bruyamment le bonheur d'avoir rencontré des compatriotes. Un beau black, athlétique, rôde parmi nous. Il observe, écoute, pianote sur le clavier d'un distributeur à billet avec une feinte indifférence...

Le bus va, déjà se dodeline sur les routes de Slovénie et je ne peux m'empêcher de penser à Trieste coincée entre la nostalgie de sa grandeur et l'impossibilité de la faire revivre...

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18.09.2012 - Trieste - 09 heures 21

...au café Tomasseo, un des plus vieux café de la ville qui se dispute avec deux trois pâtisseries du coin la présence, entre autres célébrités, de Giacomo Joyce, qui vécu à Trieste quelques temps. La carte du Tomasseo propose même un menu James Joyce pour 27 euros. Un poil surfait. C'est comme si on payait son billet d'entrée dans un musée, mais avec un repas en prime...

...

Trieste : le décati de l'inachevé s'emmêle au passé décati.

...

-Je cherche Claudio Magris, l'écrivain !
-Peut-être au café San Marco, via Cesare Batisti.

...


Le monde a changé, dit-elle. Les enfants ne respectent plus leurs parents. C'est pour ça que tout va si mal.
Je l'entends parler, mais ne voit pas à qui elle s'adresse.

...

Un goéland perché sur une muraille me crache dessus en faisant un bruit d'âne.

...

Parlé un long moment avec Allah di Samba, arrivé en Europe par Ténérife. Lui, vend des livres pour enfants et dort à la mission catholique.

...

Ici les jeans pour filles, certains magasins les proposent à 9 euros 95, les chaussures à 5 euros.

...

Des centaines de méduses dans le port.

...

Le passé, partout présent.

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17.09.2012 - Gorizia - 14 heures 49

Drissa Fofanna est inquiet. A chaque arrêt du train, il demande à ses voisins si nous arrivons à Trieste. Je l'interpelle en français ce qui le rassure, lui arrache un sourire et le fait se rapprocher de moi. Drissa est en route depuis des mois, a quitté le Mali, traversé le désert par la Lybie et pris la mer pour accoster à Lampedusa.

-Le milieu de la mer est immense, immense. On ne voit même plus la terre...

Le voilà en Italie, embauché par un Tunisien pour un salaire de 300 euros par mois, moins la nourriture. Il vend des vases. Les Italiens sont gentils. Une femme lui a un jour donné une couverture. Mais, si les choses s'arrangent, si les islamistes quittent le Mali, il retournera. Au nom de Dieu. Sa famille lui manque.

-Au Mali, tu sais, si tu as faim on va te dire viens manger... Ici c'est pas pareil.

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16.09.2012 - Laghi di Fusine - 12 heures 16

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15.09.2012 - Monte Santo di Lussari - 12 heures 56

Frioul enchanté !

Au Monte Santo di Lussari, vue somptueuse sur les Dolomites, les Alpes autrichiennes et sur le massif du Mangari.

Accessible à vélo, en télécabine ou à pieds pour se retrouver dans une carte postale grandeur nature. Une dizaine d'échoppes bordent la seule petite rue de ce hameau d'altitude. On peut y boire et manger, acheter des vues de la région, des images pieuses et des cailloux. Près de l'église, un groupe d'hommes mûrs dirigés par une jeune femme chantent à cappella des chants frioulans.

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14.09.2012 - Monte Traunig - 16 heures 30

Aujourd'hui, mollets dans le vent et pieds dans la neige !

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13.09.2012 - S. Candido - Innichen - 09 heures 17

Villach ! Un petit bourg de Carinthie dans le sud de l'Autriche où est né Paul Watzlawick, auteur, entre autres, du célèbre FAITES VOUS-MÃ?MES VOTRE MALHEUR. Le centre ville est joliment animé, fleuri, achalandé de babioles pour les touristes et constellé de pâtisseries. Si on s'éloigne de cette colonne vertébrale qu'est la grand-rue piétonne, des dizaines d'arcades vides tendent les bras à d'hypothétiques preneurs. Une multitude de slogans politiques sont graffités sur des murs décatis, sur les vitrines vides, et s'interpellent en silence.

Je n'en sais pas plus, sinon que la vitalité urbaine reste cantonnée à cette unique zone piétonne. Que les magasins qui proposent de la téléphonie sont pleins, et que Paracelse, l'alchimiste né ne Suisse a passé son enfance dans le coin. Tout ça me passe dessus comme sur un goretex trois couches. La chose que je n'oublierai pas, ce ne sont ni les faits d'histoires, ni la période romaine de Villach et les épopées passées, mais les élastiques qu'une vendeuse dans une papeterie m'a donnés parce que ça ne faisait pas sens, pour moi, d'en acheter toute une boîte.

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12.09.2012 - Tyrol italien - 15 heures 03

L'automne, d'un seul coup. Trois fois raté mes correspondances. Mouillé jusqu'au slip. Des clochers d'églises comme des crayons. Grosse bousculade dans le train de Merano. L'écoulement du présent dans le passé. Une allemande angoissée de ne pas avoir composté. Cette question qui tourne en rond comme dans une cage de hamster : d'où vient l'orgueilleuse prétention de faire une trace ? Des Italiens qui parlent l'allemand, d'autres le Latin. Une pizza à deux euros. Des troupeaux de mômes au biberon numérique. Une jeune femme de 20 ans que j'ai déjà vue à Mexico il y a trente cinq ans.

A moins que je rêve.

Mais je rêve.

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11.09.2012 - Scuol - 09 heures 32

Le vieux Scuol, d'un charme aimable, est heureusement préservé du business alpestre.

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10.09.2012 - Scuol - 12 heures 58

Je me rends au château de Tarasp, près de Scuol, petite ville de basse Engadine pas encore tout à fait défigurée comme Saint Moritz ou Davos. Mais gageons que d'ici peu, le béton, allié au mauvais goût et au fric des promoteurs auront sans doute eu raison du charme de ce Finistère helvétique (c'est ici que s'arrête le chemin de fer) pour en faire une tirelire en forme de trou du cul.

(A moins que Franz Weber sorte de son Lavaux pour venir passer des vacances par ici et relance une croisade contre les bétonneuses).

Partout où on se croise, à la montagne, on se salue. Alegre... Gruezi wohl... Tag... Hello... Bonjour... Gruees Gott,... Hi... Guten Tag.... et on se ressemble aussi tous un peu. Fringués pratique, des zips à toutes les poches, des couleurs qui grincent parfois des dents, sacs sur le dos, chantonnant, soufflant, suant, c'est nous les randonneurs.

Alors que je chemine sur une pente qui longe un château toc sur la tour duquel est inscrit HOTEL en rouge, j'entends un hurlement suivi d'un chuintement. Une balle de golf me survole et s'arrête net à mes côtés en faisant tchoc... Je n'avais pas vu le panneau : ACHTUNG GEFAHR - FLIEGENDE GOLFBÃ?LLE.

Tarasp est une merveille. Le deuxième plus beau château de Suisse, proclame un grand échalas sympathique. Construit au XI siècle il a changé de mains une multitude de fois. Propriété de l'évêque de Coire, des comtes du Tyrol, des Habsbourg, avant que Napoléon ne cède enfin le château aux Suisses. La bâtisse est assiégée, vendue, démolie, pillée, etc... Mais c'est Karl August Lingner qui sauva le château de la ruine. Il l'achète 20 000 francs en 1900, commence la restauration en 1907, la termine en 1916 et meurt d'un cancer de la gorge sans jamais avoir habité sa nouvelle demeure.

Cruel revers du destin, c'est l'angoisse bactérienne qui a fait la fortune de Karl August, le créateur d'ODOL....


Une haleine fraîche est une condition nécessaire à un sentiment de bien-être et d'assurance dans les rapports aux autres. ODOL vous offre cette confiance en vous, grâce à une combinaison équilibrée d'huiles essentielles et d'arômes garantissant une haleine fraîche.


Comme quoi l'abus d'ODOL peut-être dangereux pour la santé.

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09.09.2012 - Sils-Maria - 08 heures 34

Sommes deux dans la salle ensoleillée au petit-déjeuner.

Richard, un monsieur de 85 ans, me dit être venu ici pour la première fois en 1960. Il a travaillé 42 ans pour la même entreprise et passe une semaine par année à la Pensiun Andreola depuis 52 ans. C'est tellement beau ici, pourquoi aller ailleurs. Même si c'est chaque fois le même paysage, c'est chaque fois différent. Je venais à Sils Maria avec ma femme et un couple d'amis. Mais mes amis sont morts et ma femme a de la peine à marcher. Elle m'attend à la maison.

L'envie, oui, l'envie de faire des choses, si on peut, l'envie c'est la seule chose qui compte encore pour moi. Heureusement que mes os me supportent encore. Mais une semaine me suffit, je suis content de rentrer aujourd'hui.

Au revoir Monsieur !

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08.09.2012 - Sils-Maria -09 heures 16

Rencontre de Giacomo et d'un collègue, au cÅ?ur du bled, armés jusqu'aux dents, en route pour tirer du gibier. Je leur dis venir de Genève où la chasse est interdite, chose que les deux chasseurs trouvent inconcevable.

Puis Davos pour Kirchner, Saint Moritz pour Segantini.

A Saint-Moritz, un poil moins glauque que Davos, je me rends au musée Segantini, un bâtiment de caractère en pierre de taille. Un homme s'insurge qu'on ne lui octroie pas un rabais à l'entrée (pour X raison) et tient tête à la dame de l'accueil - restée extrêmement polie - il insiste avec une obstination pathologique qui force d'abord mon admiration suivi d'un agacement que je ne peux plus contenir. Je gratifie d'un sourire complice la préposée aux tickets pour la soulager un peu de la tension qu'a propagé cet imbécile.

Segantini, entre Anker, Giovanni Giacometti et Hodler, est certes moins novateur que Kirchner. Ce qui me plaît ce sont ses tentatives de transgresser la parfaite maîtrise de son geste, ses hésitations, comme un montagnard qui aurait décidé ne pas poursuivre son chemin vers les cimes, pleinement satisfait de la mi-pente où il se trouve.

Tautologie de l'audio guide : Bergers et bergères amènent leurs brebis à la bergerie au crépuscule... N'apprends pas grand chose de plus que ce que mon Å?il découvre dans les toiles.

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07.09.2012 - Sils-Maria - 16 heures 57

Face au mémorial de Nietzsche. Mais à quoi sert la pensée la plus fine, la plus étincelante si elle bute continuellement sur le gendarme couché de la chair ?

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06.09.2012 - Zinal - 21 heures 30

L'homme craint peut-être la montagne parce qu'elle tutoie le ciel et que jamais, quoique qu'il édifie, il n'arrivera à rivaliser avec elle. Alors il accroche à ses pentes ses câbles et ses ferrailles, y hisse des cabanes, plante sur les plus hauts pics des croix et des drapeaux, comme s'il avait conquis la lune, et confond, avec une arrogante piété, le sommet d'une montagne avec le sommet d'un clocher.

...

Vu une demi-douzaine de cerfs dans la pente et trois chevreuils à une encablure du village.

...


Jean-Louis Claude projette un film de 50 minutes sur son dernier voyage en Inde. Un véritable petit bijou en forme de point d'interrogation.

...


La montagne : la trace du paysage qui s'exténue.

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05.09.2012 - Le Pas du Chasseur - 13 heures 18

Je m'engage dans la pente du Pas du Chasseur en direction du lac d'Ar-Pitetta. C'est une montée vertigineuse qui rend le souffle court. Je me surprends à tirer sur la chaîne qui balise le parcours comme pour ramener le sommet à moi jusqu'à ce que je me rende compte qu'il vaut mieux, humblement, monter soi, à petits pas, jusqu'en haut et laisser le sommet là où il est.

Accroché à la pente, le battement d'aile d'un regret me traverse l'esprit : je suis sans téléphone, si jamais... mais si jamais est emporté par un rire qui me déborde. Une petite voix alors me dit : Pauvre cloche, laisse les Swisscom où ils sont, reprend ton souffle, apaise-toi et monte...

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04.09.2012 - Les Rochers de Nayes - 12 heures 35

Rochers de Nayes :

Vue divine sur le Léman. Visite du soigné petit Jardin alpin entretenu par une poignée de bénévoles passionnés.

Sur un banc, Montgomery Morton et leurs maîtres, jouissent en silence de ce petit paradis fleuri. Madame s'extasie quand je lui dis venir de Genève. Elle rêverait de s'installer au bord du Léman. Me trouve chanceux d'habiter une si belle région. Monsieur, lui, moins enjoué enchaîne avec le trémolo d'un souvenir qui semble douloureux. Je suis venu ici en 1974 avec ma maman, pour moi ce lieu est très important, c'est un peu un pèlerinage que nous faisons... Son souvenir est ici, dans ces rocailles fleuries. Vous comprenez, un lieu, un endroit peut être habité...

Have a good day, it was a pleasure talking to you.

...

Je devais faire pipi, confie le retraité qui surveille le jardin alpin, pas dans le jardin, bien sûr, en dehors, derrière un rocher. Alors je l'ai vu, immense, à quelques mètres de moi, et plus jamais depuis. C'était un grand aigle, il devait venir des Alpes...

....

Je saute dans le train à Montreux en direction de Sierre. A Sierre prends le car postal direction Zinal, pour me rendre chez nos deux collègues d'uneparjour, Catherine et son frère Jean-Louis.

A mi-chemin, un homme d'un bel âge, avec un sac à dos en coton bleu, interpelle le chauffeur qui s'arrête. Il peine à monter, laisse tomber sa canne, tout encombré par son bagage. Je prends ses affaires, l'aide à gravir les marches raides du car. Il s'assied à mes côtés en respirant fortement. Sa chemise en flanelle élimée libère l'odeur acide de l'effort. On ne se dit rien pendant un moment, peut-être me respire-t-il comme je le respire ? Puis très rapidement, comme s'il avait senti que j'aime les livres, le voilà à me parler de Dantes. Il est italien, professeur de littérature à la retraite, retiré pour quelques temps à Zinal. Il me confie s'intéresser à ce qui a précédé Dantes, à ce qui, en amont de la langue italienne, a irrigué son Å?uvre. Je suis étourdi par cet érudit tombé du ciel, complètement ballotté par son flot de connaissance.

Toujours partir de la source est ce que j'ai retenu de cette fulgurante rencontre, le reste je l'ai déjà oublié.

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03.09.2012 - Lac Léman - 13 heures 24

Je pars. Délicatement. Quitte le berceau de mon quotidien. M'arrache à ceux que j'aime, à ce que j'aime, à ce qui m'a nourri. Partir de Genève en bateau, pour éviter de se retrouver dans une de ces bétaillères volantes qu'on vous suspecte de vouloir faire exploser en vol, est un luxe.

Me voilà sur le Simplon (850 passagers, mille chevaux vapeurs) qui fend la bise, retrousse les vagues en dentelles...

Capitaine, je peux monter dans le poste de pilotage ? Vous allez où me demande-t-il. Vienne, peut-être, Istanbul, l'Inde... Il sourit, et doit me prendre pour un doux dingue. Je ne sais pas vraiment trop quoi dire, lui a sa barque à mener, alors pendant que je le photographie, je pense au nom de ce bateau qu'il commande, le Simplon, un col des Alpes ! Fendre les flots sur un col des Alpes n'est pas moins curieux que d'embarquer sur un bateau pour l'Inde depuis Genève.

-Bon voyage !

A Lausanne, je passe du Simplon au Général Guisan. L'ambiance est guindée, feutrée.

Un couple d'allemands, cuivré par le soleil, la soixantaine un peu lasse, promène deux nounours en peluche :

-Vous leur faites prendre l'air ?
-Ja, réplique l'homme. auf deutsch. Ce sont nos mascottes, elles nous suivent partout pour nous protéger de la pluie et du mauvais temps.
-Un parapluie ne serait pas plus pratique ?
-Ach, lustig, vous êtes très drôle...


Plus loin, dans un Tea-Room, attablé à côté de deux grand-mères :


-Je veux lui acheter une carte postale avec des papillons
-Pourquoi ?
-Mais parce qu'elle aime les papillons. C'est pour lui faire plaisir, tu sais.
...
-Tu as trouvé tes papillons ?
-Mais non. C'est pas des papillons que je cherche, c'est une carte postale avec des papillons dessus...

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02.09.2012 - On the road - 20 heures 22

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01.09.2012 - Onex - 20 heures 22

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