Zora la Transparente avait choisi la nuit
la difficulté de la tâche la fascinait: comment cerner et retenir le réel des corps alors que la nuit ne cesse de les habiller de mensonges
son hypothèse était que pour saisir et répéter les êtres, il suffisait de les shooter indifféremment et sans cesse: tous les mensonges de tous les corps de la nuit étaient finalement équivalent et se retrouvaient au hasard dans les fantasmes que les yeux des voyeurs désiraient tant faire apparaître même fugacement
le Stuyvesant club était désert ce soir-là, la déco était toujours aussi branchée, verte et noire, l'électricité crépitait dans les millions de petits circuits sur les parois et dans les rideaux
on disait que le rayonnement des circuits pénétrait les corps pour les détruire lentement
mais on s'en foutait !
la Transparente trouva quand même quelque chose à se mettre sous la dent quand débarquèrent Lola et Simone - elle leur paya quelques Sex on the Beach et les shoota de tout près en leur débitant des conneries - puis elle passa encore chez Serge le Tireur et lui laissa les cartes mémoires en lui demandant des grand formats pour le lendemain
elle laissa Serge en train de râler comme toujours et rentra se coucher, heureuse de retrouver dans ses draps sa propre odeur enfin dépouillée de tous les parfums, odeurs de sushis et after shave de luxe qui l'avaient agressée toute la journée